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L’artiste interdisciplinaire Sylvie Cotton présentait du 23 au 26 avril, à l’Agora de la danse, son spectacle hybride Chaque jour se tenir entre les trous, mêlant arts visuels, performance et musique. L’œuvre explore le thème de la respiration comme expérience universelle.
Le public entrait dans la salle de spectacle comme dans une galerie d’art. L’espace était peuplé d’artéfacts de toutes sortes : sculptures, dessins, objets trouvés etc. De grands rideaux de papier troués divisaient l’espace, le ruban adhésif réunissant les différents morceaux scintillaient sous les projecteurs, lorsque les feuilles dansaient au gré des courants d’air. Des chaises et des coussins étaient disposés à travers les œuvres, pour permettre à l’audience de prendre place au centre de l’action.
Sylvie Cotton était assistée de ses collègues Maude Arès (scénographie et sculptures), Magali Babin (conception sonore) et Kathy Kennedy (composition musicale). Les quatre artistes portaient des combinaisons de travail rouges. Cotton a entamé un monologue d’environ une heure, entrecoupé de paroles chantées, de segments musicaux et de projections vidéo. Ses comparses prenaient place au micro en alternance pour respirer amplement et faire entendre leur souffle. Fières et attentives, les « Respireuses » tissaient un arrière-plan venteux qui allait nous escorter jusqu’à la fin de la représentation.
Au fil de ses récits, toujours en mouvement, Cotton déambulait dans l’espace et nous racontait sa vie. Une installation gonflable respirait doucement près d’un socle couvert de bibelots faits main. La créatrice me confiait à la fin de la soirée, qu’elle disposait de près d’une trentaine de fragments avec lesquels elle jonglait d’une séance à l’autre. Passant d’un souvenir intime d’adolescence, à un extrait tiré d’un livre bouddhiste, puis à un fait scientifique concernant le corps humain.
Quelques sculptures mises de l’avant par Cotton dans son discours, étaient ensuite offertes à l’auditoire, placé aux quatre coins de la salle. Les objets passaient de main en main. Cette douce danse accompagnait les mots de l’artiste : « Je respire depuis 62 ans. […] Quand on revient au souffle, il n’y a plus d’illusion possible. Il n’y a rien de plus vrai. […] Un souvenir de respiration avec papa. Quand on respire, on est ensemble. […] À 16 ans, ma première peine d’amour. Je ne sais plus comment respirer. […] Respirer m’apprend à faire l’amour. Faire l’amour m’apprend à respirer. […] Dans ma vingtaine et dans ma trentaine, je ne respire pas. Je suis travailleuse culturelle. Je travaille, travaille… Les seuls moments où je respire c’est quand je fume une cigarette. »
À travers une épreuve de présence et d’endurance, Cotton nous a fait cadeau de son souffle. Par le biais de sa proposition organique et poétique, à la fois féministe, politique et méditative, la créatrice a témoigné d’une grande sagesse. Malgré toute l’attention portée à la respiration durant cette soirée, la mienne est restée calme et naturelle, jamais forcée, bercée par les histoires et l’univers de Sylvie Cotton.