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La série de textes Poésie du quotidien présente des sujets prosaïques avec une teinte poétique.
Je réalise que je ne connaissais presque rien de la vie de ma grand-mère. Et qu'il n'y a plus personne pour vraiment en témoigner. Triste, enjouée, révoltée, résignée; croyante, athée; va savoir? Rachel Perron avait-elle étudié, voyagé, aimé? Mon grand-père faisait-il aussi bien l'amour qu'elle peut-être des tartes? Prenait-elle la vie avec un grain de sel? À la fin, est-ce qu'on lui a tenu la main?
Je me rappelle la première fois que je l’ai vu. J'avais l'âge de penser qu’elle était sortie d'un moule à gâteau et qu’elle n'avait jamais été et ne serait jamais autre chose qu'une grand-mère. Il n'y avait que moi qui changeais. On ne cessait de dire, combien j'avais grandi depuis la dernière fois. Aujourd'hui, je comprends que je me sentais comme un figurant dans un film à qui l’on n'avait pas encore attribué de rôle.
Ma grand-mère n’a probablement pas fait exception à toute une génération de femmes à la maison. Le torchon à la main, à longueur de journée, effaçant au fur et à mesure toutes traces qu'elles auraient pu laisser. C’est vrai que ce n’est que depuis 1929 que les femmes ne sont plus considérées comme des objets. Mais de temps en temps, leurs enfants passent au CHSLD leur donner un coup de plumeau. Et les petits enfants bien eux, ils n'ont pas le temps. Et des décennies plus tard, ils demandent à leurs parents : quel était le prénom de grand-maman déjà?
Le grand metteur en scène André Brassard les a mises en scène divinement, en les amenant sous les feux de la rampe. Alors que lui a fait sa sortie dans l’ombre. Diminué et dans l'extrême solitude.
La dernière cassette jusqu'au 30 septembre au théâtre de Quat'Sous.